Nouvelle orientation du gouvernement canadien dans le dossier de l’aide internationale


Depuis les derniers mois, un vent nouveau souffle sur l’aide internationale canadienne. De nombreux changements ont été annoncés par le gouvernement fédéral, faisant place à une réorientation stratégique pour les prochaines années. La dernière grande décision fut divulguée la semaine dernière: l’Agence canadienne de développement international (ACDI) sera dissoute, pour être intégrée au Ministère des affaires étrangères et du commerce international (MAECI). Une décision qui ne fait pas l’unanimité. Une décision qui génère plusieurs critiques, certes, mais surtout de l’appréhension, particulièrement dans le milieu coopératif. Une décision qui laisse croire que ce vent nouveau n’est en fait que le début de la tempête…

Je vous propose, via le lien ci-dessous, un court entretien télévisé avec François Audet, chercheur de l'Observatoire canadien sur les crises et l'action humanitaire de l'Université de Montréal. M. Audet y explique les principaux constats à partir des changements observés dans la politique canadienne en ce qui concerne l’aide internationale.



En bref, voici un aperçu des principaux événements qui ont mené à la situation actuelle. Rien de mieux qu’un petit retour en arrière pour mieux comprendre ce qui arrive aujourd’hui!

Source: http://www.acdi-cida.gc.ca/index.htm

Chronologie des événements marquants (1):
1968 : Création de l’ACDI, appuyée par l’opinion de la population, qui juge désormais intenable d’assister à une telle pauvreté à 80 % de la planète.
1990 : Plus de 30 % de coupures dans les budgets de l’ACDI, en raison de l’austérité qui s’impose, selon le gouvernement libéral en place.
2000 : Lors de l’Assemblée générale de l’ONU, les ONG réussissent à convaincre le gouvernement de lancer un programme de relance du développement, malgré le budget modeste.
2001-2005 : Des organisations à caractère religieux reçoivent 42 % plus d’argent pour des projets d’aide internationale.
2006 : Le diplomate Derek Burney suggère au gouvernement Harper d’intégrer l’ACDI au ministère des Affaires étrangères. Une proposition qui s’est vue refusée, étant donné les contestations.
2010 : Le Canada est refusé au Conseil de sécurité de l’ONU.
2011 : Le gouvernement conservateur, avec à sa tête le premier ministre, M. Harper, est réélu, cette fois à titre de gouvernement majoritaire.
Mars 2012: L’agence Droits et Démocratie (reconnue mondialement) est abolie et l’aide canadienne se retire de nombreux pays pauvres, notamment en Afrique.
Novembre 2012 : Le ministre de la Coopération internationale, M. Fantino, annonce la nouvelle orientation officielle de l’aide internationale : elle devra désormais avoir une portée économique pour le Canada, particulièrement pour le secteur privé canadien.
Janvier 2013 : Ottawa annonce qu’il gèle les fonds pour de nouveaux projets en Haïti. À ce jour, 80 % des 3,5 milliards $ du budget de  l'ACDI visent dorénavant seulement 20 pays.
Mars 2013 : l’ACDI est fusionnée au MAECI.
On peut donc constater que les changements actuels étaient en quelque sorte prévisibles et suivent une certaine logique de la part du gouvernement fédéral.


Ce qu’il faut comprendre de tous ces bouleversements:

On y voit une forte volonté de la part du gouvernement fédéral de prioriser l’économie canadienne, ce qui peut être perçu comme tout à fait légitime dans le contexte de la crise économique mondiale. Même les organismes d’aide au développement reconnaissent que le privé a son rôle à jouer. Elles n’y voient pas de mal à ce que les entreprises s’impliquent dans des projets humanitaires ou de développement, à la seule condition que ces dernières contribuent réellement au développement de la population locale. Pour assurer cette condition, les organisations nationales et internationales ont besoin d’être sur place et de contribuer à ces projets.

Ainsi, ce qui préoccupe principalement les contestataires du milieu, ce sont les conséquences de ce nouveau tournant sur les organisations et les projets de coopération qui n’ont pas de lien avec le privé. Si la priorité est donnée au privé, la survie de nombreuses organisations est remise en question. En ce sens, on peut penser qu’à long terme, les projets de développement seront assurés uniquement par le secteur privé, et ce, dans des pays où il y a des ressources intéressantes pour les entreprises canadiennes. Dans un tel contexte, pourrons-nous toujours parler « d’aide » internationale? Et que dire de la réputation du Canada à l’échelle mondiale? Comment sera perçue cette dite « aide » par les autres pays?

Sur une note un peu plus optimiste, terminons en mentionnant que ces bouleversements ont tout de même eu l'effet de stimuler les intéressées du milieu coopératif à s'unir et à chercher ensemble des solutions pour compenser le manque de financement du gouvernement fédéral. La province de Québec a d'ailleurs créé un comité qui se penchera prochainement sur la possibilité de fonder une agence québécoise de coopération internationale, dont le financement serait assuré par la portion d'impôt que la province remet au fédéral pour contribuer au volet développement et coopération internationale. Dans tous les cas, il est clair qu'il sera nécessaire pour les organisations du milieu non-lucratif de tenter des rapprochements avec le secteur privé, afin de démontrer aux entreprises que leur expertise est essentielle pour assurer un développement durable et responsable.

Annie Carrier
......

1) Beaudet, Pierre. « La fin de l’ACDI, prévue et prévisible ». Le Devoir, samedi 23 mars 2013, p.B5.


2) Duperron, Christian. « Harper introduit la foi chrétienne dans les programmes de l’ACDI ». Radio-Canada, 14 janvier 2013. Disponible en ligne à : http://quebec.huffingtonpost.ca/2013/01/14/harper-subventions-acdi-ong-religieuses_n_2470636.html


3) Jury, Pierre. « Fantino et la confusion de l’aide internationale ». Le Droit, 5 janvier 2013. Disponible en ligne à : http://www.lapresse.ca/le-droit/opinions/editoriaux/pierre-jury/201301/04/01-4608549-fantino-et-la-confusion-de-laide-internationale.php

4) Vastel, Marie. « Aide internationale : cap sur le privé, confirme Ottawa ». Le Droit, 24 novembre 2012. Disponible en ligne à : http://www.ledevoir.com/politique/canada/364812/aide-internationale-cap-sur-le-prive-confirme-ottawa


7 commentaires:

  1. Comme vous mentionnez si bien, la fusion de l’ACDI au MAECI est purement politique. Elle témoigne de la « nouvelle » réorientation de l’aide international du gouvernement conservateur actuel.
    La tourmente dans laquelle se trouvent plusieurs ONG canadiennes laisse réfléchir sur la capacité de financement de ces ONG et sur la planification stratégique de celles-ci. Il va sans doute dire qu’une ONG qui reçoit ses fonds en grande partie de l’ACDI se retrouvera en mauvais posture. Le Ministre Fantino dans une entrevue à Radio Canada a déclaré « Nous ne finançons pas les ONG à perpétuité » . Il soutenait d’ailleurs que dans une autre entrevue, aussi cru que cela peut paraitre, que l’ACDI n’existait pas pour garder les finances de ces ONG à flot . Cette réalité soulève encore une fois de plus la problématique sur leurs sources de financement. Le changement de donne dans la politique canadienne en matière d’aide publique au développement (APD) doit amener une nouvelle réflexion et une nouvelle dynamique dans les ONG au Canada et au Québec. Pour continuer à opérer, elles pourraient procéder à des fusions afin d’accroître leurs bassins de financement mais aussi leur impact sur le terrain. Par exemple, l’AQOCI (association québécoise des organismes en coopération international) qui regroupe plusieurs ONG de grandes et de petites tailles pourrait fusionner en une seule ONG.
    Je souhaiterais également dire un petit mot sur la responsabilité sociale des entreprises. Vu que l’ACDI relève dorénavant du MAECI, cela signifie que l’aide en développement va se faire à travers les entreprises canadiennes opérant dans les pays en développement. Cela peut être une belle initiative mais comporte d’énormes risques. Les politiques dans ces pays concernés sont faibles auxquelles s’ajoute un niveau de corruption élevé. Comment s’assurer que ces entreprises paient leur juste part ? Comment savoir qu’elles sont soucieuses de développement durable, de l’environnement, du bien-être des populations locales ?
    Je cherche enfin à comprendre, de la perspective des pays « prioritaires » et bénéficiaires de l’APD du Canada ce que cette fusion représente en termes d’impact sur mes relations avec le Canada.

    http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2012/11/28/006-fantino-financement-acdi-mercredi.shtml

    http://www.rcinet.ca/francais/a-l-affiche/reportages-2012/13-14_2012-12-06-virage-economique-pour-l-aide-humanitaire-internationale-canadienne/

    Issa

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    1. Merci Issa pour ce commentaire qui pousse la réflexion sur l'impact de ce changement politique.
      Il est effectivement clair que les ONG devront se positionner afin de trouver des alternatives pour compenser le manque ou la diminution de financement presque inévitable du gouvernement fédéral. L'option de fusionner certains ONG ensemble est tout à fait envisageable, se ralliant ainsi à une cause commune, plutôt qu'à la survie de chacune des instances. En s'associant ainsi, bon nombre de petits projets risquent toutefois de disparaître, mais sans financement, ils sont visiblement voués à l'échec d'une manière ou d'une autre. Pour les ONG qui resteront, ou survivront devrait-on dire, il sera de mise de prioriser les actions en tentant de rejoindre les intérêts du gouvernement fédéral. Bref, il est clair que le milieu du développement prendra un tout autre visage dans les prochaines années... « Avec ce changement de philosophie, les organisations se voient contraintes d'entrer dans le moule, donc de relayer la politique étrangère canadienne. Or, le problème ne se poserait pas si les organismes pouvaient compter sur d'autres sources de financement. Mais « le don du public au Canada n'est pas très important », affirme M. François Audet, directeur de l'Observatoire canadien des crises et de l'aide humanitaire. (1)

      Ainsi, il serait pertinent pour les ONG de prévoir une multiplication des sources de financement. Premièrement, pour que les dons du public soient plus importants, il faut s’assurer de faire des campagnes de sensibilisation afin de « toucher » ce public. Nous le savons tous pertinemment : pour la moyenne des gens, plus un événement malheureux ou des conditions insoutenables sont éloignées de leur réalité, moins ils se sentent concernés. Pourtant, certaines occasions peuvent favoriser un élan d’entraide, si on prend l’exemple du séisme d’Haïti qui a donné lieu à une forte contribution des Québécois.(2) En Belgique, « [p]our accroître leurs fonds dans un marché belge très “concurrentiel” en termes de dons, les ONG mettent en place des stratégies de récolte de fonds telles que l’envoi ciblé de mailings à des fichiers de donateurs, la diffusion de spots publicitaires, la vente de cartes postales, etc. Certaines ONG ont recours à des sociétés spécialisées en marketing social. »(3)

      De plus, une association avec le secteur privé pourrait agir, selon moi, en leur faveur. Pour le financement, certes, mais également pour la question de la responsabilité sociale que vous avez soulignée. En effet, les entreprises qui s'associeraient directement avec certaines ONG afin de réaliser un projet de développement international en ressortiraient gagnantes en ce sens, car les ONG prendraient les mesures nécessaires pour que la population locale soit bénéficiaire de ce développement de manière durable. Ce serait, sommes toutes, une relation de gagnant-gagnant.

      Annie

      Sources:
      (1) « ACDI : vers une aide internationale qui favorise les inégalités ?», Radio-Canada, disponible en ligne à : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2013/03/25/007-acdi-inegalites-occah.shtml

      (2) « Haïti : les Canadiens, les plus généreux? », La Presse, le 29 janvier 2010, disponible en ligne à : http://www.lapresse.ca/le-soleil/dossiers/seisme-en-haiti/201001/28/01-944123-haiti-les-canadiens-les-plus-genereux.php

      (3) « Le financement des ONG », ACODEV, disponible en ligne à : http://www.acodev.be/les-ong-de-developpement/le-financement-des-ong

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  2. Cette dernière nouvelle annonçant la fusion entre l’Agence canadienne de développement international (ACDI) et le ministère des Affaires étrangères et du commerce international (MAECI) lors du budget fédéral de 2013-2014 laisse présager une vague de changements dans la manière d’administrer et d’orienter l’aide au développement international. À l’origine, l’ACDI avait pour mandat de :
    - gérer l'appui du Canada au développement international et les ressources qu'il y consacre de façon efficace et responsable en vue d'obtenir des résultats durables et significatifs;
    - s'engager dans l'élaboration de politiques de développement au Canada et sur la scène internationale afin d'aider le Canada à atteindre ses objectifs au chapitre du développement. (1)

    Le premier changement que cette fusion pourrait amener concerne la crainte de voir dilué ou dissipé ces mandats dans les objectifs de la politique étrangère canadienne et des orientations du MAECI. En effet, les objectifs du MAECI visent principalement à promouvoir les valeurs canadiennes en matière de politique étrangère, à assurer la sécurité du Canada et à améliorer les perspectives économiques des canadiens. En ce sens, par exemple, cela fait craindre au CCCI (Conseil canadien de la coopération international) une place prépondérante accordée aux sociétés canadiennes à l’étranger visant notamment la promotion d’accords favorisant le commerce et les investissements qui pourrait se faire au détriment du mandat principal de l’ACDI soit de réduire la pauvreté. Ainsi, en fusionnant les deux instances cela pour occasionner un changement dans les fonds alloués puisqu’ils seront dorénavant conjoints.
    Selon François Audet, directeur de l’observatoire des crises et de l’aide humanitaire, ce changement ne fait que «fermer le couvercle sur un changement bien amorcé depuis plusieurs années ». (2) Il est possible par exemple de faire mention d’une particularité de l’orientation de l’aide depuis l’arrivée au pouvoir des conservateurs que François Audet qualifie de «confessionnalisation de l’aide». En effet, les organisations à caractère religieux ont reçu 42% (3) plus de financement d’Ottawa depuis l’arrivée des conservateurs. Un autre exemple de changement concerne les coupures annoncées lors du budget de 2012 annonçant des coupures de l’ordre de plus de 319 millions de $ d’ici 2015 . (4) Bien que le Canada s’est engagé en 2008 à consacrer 0,7% de son PIB au développement international, selon ces dernières mesures il atteindra 0,25% de PIB d’ici 2015 positionnant ainsi le Canada au bas de la liste des pays donateurs. Bref, plusieurs actions récentes du gouvernement conservateur font craindre une perte d’indépendance de l’aide au développement ainsi qu’une orientation de l’aide favorisant le développement économique de sociétés canadiennes au détriment des plus pauvres.
    À l’opposé, il est également important de faire part de plusieurs critiques qui étaient lancés à l’endroit de l’ACDI principalement par rapport à sa structure organisationnelle trop lourde occasionnant des frais administratifs et de contrôle à près de 50% de son budget . (5) D’ailleurs selon les recommandations de l’OCDE en 2007, l’ACDI devrait revoir la structure organisationnelle de l’agence et également mettre en place une structure permettant de favoriser une meilleure gestion financière. Bref, il est important également de faire part de cet aspect organisationnel de l’ACDI qui faisait de cette agence un «monstre bureaucratique».
    Néanmoins, il est important de faire part des craintes quant aux changements qui suivront sous peu et d’évaluer quels seront les impacts vis-à-vis l’orientation de l’aide au développement. Bref, c’est une histoire à suivre…

    Simon P. Boily

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  3. CI-JOINT, LES RÉFÉRENCES.


    (1) «À propos de l’ACDI», ACDI, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.acdi-cida.gc.ca/acdi-cida/acdi-cida.nsf/fra/NIC-5313423-N2A, (dernière consultation le 13 avril 2013).
    (2) «ACDI : vers une aide internationale qui favorise les inégalités ?», Radio-Canada, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2013/03/25/007-acdi-inegalites-occah.shtml, (dernière consultation le 13 avril 2013).
    (3) Ibid.
    (4) «Budget 2013 : L’ACDI sera intégrée au MAECI», SCFP, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://scfp.ca/budget/budget-2013-lacdi-sera-integree-au, (dernière consultation le 13 avril 2013).
    (5)«Libre d’opinion – Fusion ACDI et Affaires étrangères : un geste logique», Georges Paquet, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.ledevoir.com/politique/canada/374141/fusion-acdi-et-affaires-etrangeresun-geste-logique, (dernière consultation le 13 avril 2013).
    Chapitre 4. Organisation et gestion », OCDE, Revue de l'OCDE sur le développement, 2007/4 n° 8, p. 353-367.

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    1. Merci Simon, tes précisions sont très appréciées, de même que ton analyse des enjeux et conséquences que pourront entraîner les changements d’orientation du gouvernement fédéral en matière d’aide internationale, particulièrement en ce qui a trait à l’intégration de l’ACDI au MAECI.

      J’aimerais ajouter quelques informations à ce sujet. J’ai discuté avec une connaissance qui travaille au MAECI présentement et elle m’a confié que même à l’interne, les employés n’ont pas la moindre idée de la manière que ce changement majeur va s’orchestrer et quels en seront les impacts directs sur leur travail. Il semblerait que la décision ait été prise et annoncée avant même qu’un plan d’action ait été mis en place pour ce changement d’envergure, ne serait-ce qu’au simple plan de la logistique. À ce jour, rien ne semble avoir vraiment changé, ni dans les bureaux de l'ACDI que ceux du MAECI. Les conséquences à long terme restent donc très incertaines. D’un autre côté, on peut espérer que ce changement contribue effectivement à régler la situation problématique des lourdeurs administratives et bureaucratiques qui planait sur l’institution de l’ACDI, tel que souligné dans ton commentaire… mais seul l’avenir nous le révélera…

      Une chose est certaine, cela nous affectera assurément tous d’une certaine manière, que ce soit de proche ou de loin, étant donné notre intérêt commun pour le développement international. Cela voudrait peut-être dire que certains d’entre nous œuvreront un jour pour des entreprises qui auront désormais pris la place des ONG que nous connaissons aujourd’hui… qui sait?

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  4. Le problème causé par la fusion de l'ACDI avec le MAECI est de taille pour le milieu coopératif canadien mais le problème est peut-être plus profond que cela et devrait aussi être exploré sous un autre angle. Malgré ce repositionnement du gouvernement canadien, on peut dire que le débat et les inquiétudes sont restés en grande partie dans les cercles universitaires et du monde du développement et de l'humanitaire. La société civile autant que les médias ont très peu réagit à la nouvelle et semblent ne pas se sentir concerner par la question. De là à ce poser la question, de nos jours, quelle est l'importance réelle des questions de développement pour la population canadienne? La population canadienne se soucie t'il réellement de l'image du Canada dans les pays en voie de développement? Avec un virage axé vers des projets d'ordre économique, les ONG pourront t'ils compétitionner avec le secteur privé en terme d'efficacité et d'efficience? Et quel rôle les ONG doivent t'ils jouer dans cette nouvel dynamique?

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  5. Merci Didi d'avoir amené cette réflexion à un autre niveau. Je suis d'accord avec toi que ce changement nous fait revenir à l'essentiel, à se questionner sur les valeurs, les priorités et les ambitions de la société canadienne. Le gouvernement Harper prétend suivre ces priorités du peuple canadien afin de mieux orienter ses stratégies et décisions politiques. C’est ainsi qu’il se permet de faire des coupures considérables dans le secteur de la coopération internationale, de la culture et de l’environnement, entre autres. Ceux qui regardent la télévision sauront témoigner que nous sommes bombardés de publicités en lien avec le "Plan d'action économique du Canada", qui vante les besoins en création d'emploi, en croissance et en prospérité.(1) On peut même se demander si ces priorités viennent réellement du peuple ou si elles sont celles du gouvernement, qui met en place plusieurs actions afin de laisser croire aux Canadiens que cela vient d'eux.

    Mais revenons à la base, quelles sont ces priorités? Sont-elles réellement et purement économiques? Selon un sondage de IRPP-Nanos Research, la santé et l’économie sembleraient être les deux éléments prioritaires parmi une liste de 10 éléments proposés.(2) La coopération internationale viendrait donc assurément dans les éléments beaucoup moins populaires…

    Voici un extrait d’un article que j’ai beaucoup apprécié sur le sujet et qui fait une comparaison intéressante avec le domaine de l’environnement:
    « L'aide internationale est du même acabit que la protection de l'environnement. Il s'agit d'enjeux qui ne semblent pas toucher les citoyens directement, mais qui, sans le réaliser, ont de profondes et souvent dramatiques répercussions au niveau global. Cela amène les pays responsables des problèmes de pollution planétaire, qui génèrent les changements climatiques, à investir pour prévenir et atténuer l'impact de leur développement industriel. De même, les pays responsables des impacts du néolibéralisme qui fomentent les inégalités sociales et les conflits doivent pareillement faire leur part pour réduire, même modestement, les écarts économiques. On vient ainsi aider et assister les populations victimes des conflits et des catastrophes climatiques sans se soucier de leur origine.»(3)

    Comme je l’ai mentionné dans le cadre de ma première réponse au commentaire de Issa, les gens doivent se sentir « touchés » ou concernés par certaines questions pour y contribuer. Or, « les fonds accordés à l'éducation du public, qui vise à informer « la population sur ce qui se fait en matière d'aide internationale », se sont vus rapidement coupés avec l'élection des conservateurs. »(4) Il s’agit donc visiblement un cercle vicieux, où la population ne se trouve certainement pas en toute connaissance de cause…
    Comme tu le soulignes, les ONG auront donc assurément un rôle majeur dans ce facteur de sensibilisation et de concertation de la population.

    Sources:
    (1) http://plandaction.gc.ca/fr/page/priorites

    (2) « La santé et l’économie, priorités des Canadiens », La Presse, 25 juillet 2012, disponible en ligne à : http://www.lapresse.ca/actualites/quebec-canada/national/201207/25/01-4558658-la-sante-et-leconomie-priorites-des-canadiens.php

    (3) « Vous avez dit l’ACDI? », François Audet, le 25 mars 2013, disponible en ligne à : http://www.occah.org/89-publications/vous-avez-dit-l-acdi-.html

    (4) « ACDI : vers une aide internationale qui favorise les inégalités ?», Radio-Canada, disponible en ligne à : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2013/03/25/007-acdi-inegalites-occah.shtml

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