Les ressources naturelles: l'objet de convoitise planétaire


"Parce que toutes les cinq secondes, c'est l'équivalent du poids d'une Tour Eiffel de ressources naturelles qui est prélevé des écosystèmes et des mines."
- Slogan de la campagne Une seule planète.

Forêt, eau, minerais... depuis toujours, l'humain a utilisé ces ressources pour se développer. Aujourd'hui, nous sommes près de 7 milliards d'individus sur Terre, utilisant ces ressources à différents niveaux. Les populations des pays industrialisés sont des champions en la matière: on parle désormais de surconsommation. D'où l'importance d'optimiser l'exploitation de ces ressources à l'échelle planétaire. Le fait est que la majorité des ressources naturelles se trouvent dans les pays du Sud, également nommés "pays en développement", ou encore, "pays pauvres". Ces pays sont donc riches... et pauvres à la fois...

Face à ce constat, il est légitime de se questionner: comment se fait-il que presque tous les pays où se trouvent les richesses ne profitent pas véritablement de cet avantage naturel? Certains observateurs parlent entre autres d’ingérence et de corruption des gouvernements locaux. D'autres prétendent que les multinationales impliquées en retirent tous les profits, sans en faire profiter la population locale. Visiblement, le problème ne vient pas du manque d'intérêt d'exploiter ces ressources. 

L'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis, le Canada ainsi que de nombreux pays européens se portent volontaires et assurent leur présence dans ces pays au nom du développement, afin d'apporter un soutien aux gouvernements locaux "dans leurs efforts en vue d'exploiter leurs ressources, développer leurs économies et permettre à leurs populations de bénéficier d'avantages sociaux" (1). C'est ainsi que les gouvernements respectifs des pays développés font appel à leurs entreprises privées reconnues pour leur expertise dans les secteurs souhaités (par exemple, les entreprises minières) pour apporter un support, un capital ainsi que le matériel nécessaire pour exploiter les ressources existantes. S'ajoute à cela des programmes divers (par exemple, des formations) dédiés à la population locale, afin d'appuyer le développement de celle-ci à long terme.

Source: AUSAID


Source: United Nations Africa Renewal 2013

Les entreprises minières canadiennes sont un exemple qui illustre bien ce type d'intervention et le gouvernement canadien en fait l'une des priorités des programmes d'aide internationale. Le ministre de la Coopération internationale, M. Fantino, a  d'ailleurs déclaré il y a quelques semaines: "le secteur de l'extraction, s'il est géré de manière responsable, peut favoriser une croissance économique durable, permettre la création d'emplois et avoir des répercussions positives sur les familles et leurs collectivités." (2) En guise d'exemple, l'entreprise canadienne IAMGOLD a signé une entente multilatérale avec l'ACDI et avec un groupe d'aide privé, Plan Canada, afin de réaliser un projet d'exploitation d'or au Burkina Faso, tout en assurant un programme de formation professionnelle dans la localité. (3)

En observant cette façon de faire, tout semble en ordre pour que ces objectifs de développement se réalisent. Pourtant, dans les faits, on constate très peu de réduction de la pauvreté locale. Le cas de l'Angola est totalement révélateur en ce sens: alors qu'il est l'un des premiers pays producteurs de pétrole en Afrique, le taux de chômage est d'environ 80 % et même que 54 % de la population vit en dessous du seuil de la pauvreté. (4)

Paradoxalement, les entreprises dans le secteur de l'extraction ont souvent un chiffre d'affaires relativement élevé. L'exemple du Niger, qui détient un PIB de 2,7 milliards d'euros, alors qu'une entreprise française, Areva, réussit à atteindre un chiffre d'affaires de 13 milliards d'euros en exploitant l'uranium de ce pays illustre tout à fait cet écart. (5)

En réalité, ces entreprises ont-elles réellement besoin de financement pour ces projets?
À la lumière de ces constats, il est maintenant temps de se demander si le développement ne serait pas devenu un prétexte pour les entreprises d'exploiter les ressources sans se faire nécessairement critiquer par la communauté internationale.

Autres problématiques

En plus de ne pas contribuer au développement de la population locale à juste titre, cette façon d'intervenir dans les secteurs d'exploitation des ressources naturelles des pays en développement contribue à renforcer le rapport de forces et à creuser le fossé des inégalités, non seulement économiques, mais également sociales et écologiques, et ce, entre les pays du Nord et du Sud, et au sein même des pays du Sud.

En effet, des problèmes environnementaux et sociaux sont souvent reliés à l'exploitation des ressources naturelles. Il arrive que certaines populations doivent se voir expropriées et privées de terre afin de permettre l'installation des zones d'exploitation. Des risques sanitaires et sécuritaires confrontent également ceux qui y travaillent ou habitent dans les environs.

Sur une base à plus long terme, il faut d'autant plus penser qu'il ne s'agit pas véritablement d'un développement dit "durable", puisque les ressources ne sont visiblement pas inépuisables... Ainsi, on peut facilement croire que lorsque les gisements seront épuisés, l'intérêt des entreprises et des gouvernements des pays développés sera beaucoup moins présent dans ces pays, qui, eux, auront pourtant toujours autant besoin d'aide...

Enfin, il est pertinent d'apporter le questionnement sur les arrangements qui sont fait entre le pays aidant et le pays aidé. En fait, on peut soupçonner un certain conflit d'intérêts pour les entreprises: comment peuvent-elles dire aux locaux de charger un prix "équitable" lorsqu'elles veulent profiter des ressources au meilleur prix possible? Il ne faut pas oublier qu'elles ont des intérêts avant tout...


Une lueur d'espoir?

Voici quelques points positifs qui peuvent laisser croire qu'il y a de l'espoir et que le dossier de l'exploitation des ressources naturelles sera dorénavant régulé et observé de plus près par les instances internationales afin que le développement soit plus équitable, plus transparent, plus durable et plus responsable.

Le Sénat américain a voté pour une loi qui oblige les entreprises liées à l'industrie extractive à déclarer les versements effectués au gouvernement de chacun des pays dans lesquels elles opèrent. Ainsi, cette mesure devrait permettre plus de transparence pour que les citoyens des pays producteurs connaissent les montants reçus et puissent vérifier l'utilisation efficace de ces recettes. (6)

Il existe aussi des exemples de pays qui ont réussis à générer des revenus majeurs dans l'extraction de leurs ressources naturelles et à utiliser cet argent pour le bien de leur population. L'Indonésie a notamment "mis en oeuvre une politique de diversification, de développement du secteur non-pétrolier et de lutte contre la pauvreté, en investissant dans le secteur agricole et les zones rurales pauvres". (7) La Bolivie s'est également récemment démarquée en imposant une série de réglementations qui permet désormais de redistribuer les bénéfices de l'exploitation du pétrole et du gaz.

C'est à partir de ces exemples de réglementation qu'on peut croire qu'il est effectivement possible que les ententes multilatérales entre le secteur privé, les organisations non-lucratives et les gouvernements respectifs peuvent véritablement être réalisées dans une visée de développement local durable et responsable.

Annie Carrier

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1) "L'exploitation minière en faveur du développement en Afrique", par AustralianAID, disponible en ligne à http://www.ausaid.gov.au/countries/ame/Documents/ausaid-mining-brochure-french.pdf
2) "Le gouvernement Harper et le Forum économique mondial s'engagent à améliorer la prospérité dans les pays en développement grâce au développement responsable des ressources naturelles", par ACDI, disponible en ligne à http://www.acdi-cida.gc.ca/acdi-cida/acdi-cida.nsf/fra/CEC-31194141-2U5
3) Buzzetti, Hélène. "Le Canada et le développement international - L'aide par et pour... les entreprises". Le Devoir, 8 décembre 2012.
4) "Les ressources naturelles: une triste richesse", par Guillaume Lannerée, revue Altermonde, Hors Série  numéro 9, disponible en ligne à http://altermondes.org/spip.php?article744  
5) Idem
6) "Pour en finir avec la malédiction des ressources naturelles", par Oxfam France, disponible en ligne à http://www.oxfamfrance.org/Malediction-des-ressources,799
7) Idem


9 commentaires:

  1. Votre billet traite d’un sujet intéressant se rapportant à l’aide internationale. Il met également en perspective les orientations actuelles du Canada en matière de coopération internationale. Votre question, « […] comment se fait-il que presque tous les pays où se trouvent les richesses ne profitent pas véritablement de cet avantage naturel? », est bien développée. À ce sujet, notons que dans certains pays en développement, en dépit de leurs richesses en ressources naturelles, « Plus d’un milliard de personnes vivent encore sous le seuil extrême de pauvreté d’un dollar par jour, et le fossé entre riches et pauvres ne fait qu’augmenter » [1]. J’aimerais davantage cependant orienter mes commentaires sur le cas de l’Afrique où « l'exploitation des ressources minières et pétrolières sans considération pour les conséquences environnementales ou sociales» [2] pose non seulement des problèmes de développement économique durable, mais aussi des problèmes de droits humains [1][2].
    À cet effet, un blogueur mettait l'accent sur la question des ressources en tant que source de conflit ou ressource pour la paix et la reconstruction de l'Ouganda et de la République Démocratique du Congo. Le texte ouvre aussi une perspective sur la manière de transformer les conflits en se servant des ressources en tant qu'instruments de réconciliation et de reconstruction dans la région des Grands Lacs [4]. Dans sa conclusion Yav Katshung mentionnait la nécessité de « développer des institutions et des cadres pour l'intégration et la transformation de l'économie informelle en économie formelle, gouvernée par une législation raisonnable, la transparence et l'efficacité, sans marginaliser les acteurs locaux et régionaux ».
    Le Canada a annoncé, par la voix de son premier ministre, un soutien à l'exploitation responsable des ressources naturelles en Afrique [4]. De plus, les nouvelles orientations en matière d’aide internationale du gouvernement fédéral du Canada comptent s’appuyer sur le secteur privé en donnant la priorité à l’économie canadienne et notamment aux entreprises qui partent à « la conquête des ressources naturelles des pays en développement » [5].
    L’espoir d’une meilleure utilisation de ces ressources est assez mince [6], cependant comme vous le mentionnez dans votre billet, il ya encore « quelques points positifs qui peuvent laisser croire qu'il y a de l'espoir et que le dossier de l'exploitation des ressources naturelles [des pays africains] sera dorénavant régulé et observé de plus près par les instances internationales afin que le développement soit plus équitable, plus transparent, plus durable et plus responsable ». Néanmoins, une question se pose, à qui incombe la responsabilité de rendre ce développement plus équitable, est-ce réellement aux instances internationales ou aux instances des pays concernés?

    Norrin Halilem, Ph.D.

    [1] http://www.globalrights.org/site/DocServer/Natural_ResourcesFrench-New_logo.pdf?docID=11623
    [2] « Exploitation des ressources naturelles et protection des droits de l'homme », Colloque , Calenda, Publié le mardi 13 septembre 2011, http://calenda.org/205243
    [3] http://joseyav.afrikblog.com/archives/2008/02/06/7847635.html
    [4] http://pm.gc.ca/fra/media.asp?id=5219
    [5] http://www.histoire-pour-tous.fr/dossiers/98-xixe-siecle/1424-lexpansion-des-etats-unis-et-la-conquete-de-louest.html
    [6] http://www.lce-algerie.com/entreprises-et-marche/16-entreprise-et-marche/601-afrique-quand-les-multinationales-pillent-le-continent-noir.html

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    1. D’abord merci pour votre intérêt et pour ces précisions, qui sont sans aucun doute nécessaires à la compréhension de la problématique, particulièrement en ce qui concerne le continent africain. J’aimerais maintenant tenter de répondre à la question que vous avez posé : « à qui incombe la responsabilité de rendre ce développement plus équitable, est-ce réellement aux instances internationales ou aux instances des pays concernés? »

      Il est certain qu’en constatant la réalité actuelle des pays en développement dans la question de l’extraction des ressources naturelles, on peut rapidement penser qu’ils ne sont pas en mesure d’assurer eux-mêmes la gestion du développement de manière à ce qu’il soit durable, équitable et, je dirais même, rentable pour leur population. Toutefois, pouvons-nous réellement faire confiance aux pays riches qui désirent avant tout exploiter ces ressources afin d’assurer ce développement durable et équitable? Je crois bien qu’on peut se permettre d’en douter… À la lumière de ce constat, qui peut donc véritablement se porter garant de ce développement durable et équitable, sinon des instances internationales?

      Prenons le cas des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), par exemple. Les Nations unies se sont fixés huit objectifs en l’an 2000 pour améliorer le développement à l’échelle planétaire et ce, sur une durée de15 ans. À l’aube de l’échéance fixée, force est de constater que les résultats sont partagés : « [s]’il y a quelques signes encourageants de développement dans certaines régions d’Asie et d’Amérique latine, l’Afrique ne se porte quant à elle pas beaucoup mieux qu’il y a dix ans et, pour ce qui concerne l’Afrique subsaharienne, les conditions de vie des populations ne cessent de se dégrader. » (1) Ainsi, même cette instance internationale n’a pas réussit à remplir son mandat de mettre en œuvre des conditions indispensables du développement. « Les causes du retard dans la réalisation de ces Objectifs se nomment recherche de surprofits et gestion non durable des ressources. » (1) Le modèle de développement capitaliste prôné par une grande partie des pays riches de ce monde fait en sorte que les inégalités économiques et sociales ne font qu’augmenter, bien entendu, à leur profit. Pour une meilleure répartition des richesses issues de l’exploitation des ressources naturelles, « une régulation contraignante des multinationales et l’implication des populations locales sont indispensables. » (1) Or, jusqu’à présent, ce sont plutôt les gouvernements des puissances économiques qui imposent leurs façons de faire, en optant pour des politique pour sécuriser leur accès aux ressources à perpétuité. Une prise de conscience sera de loin nécessaire, particulièrement par les pays signataires de la Déclaration du Millénaire, afin d’assurer une gestion durable de ces ressources, dans une optique plus globale que protectionniste.

      En ce sens, j’estime qu’il s’agit d’une responsabilité partagée entre les pays dits « du Nord », afin d’imposer des principes de Responsabilité sociale des entreprises (RSE) aux multinationales qui exploitent des ressources naturelles dans des pays en développement, et les instances internationales, comme l’OMD/l’ONU, et la FIDA (Fonds international de développement agricole) (2), par exemple, afin de réguler et assurer le respect des principes de développement durable et équitable partout sur la planète.

      Et vous, qu’en pensez-vous?

      Sources :

      (1) « La lutte contre la pauvreté et les inégalités passe par une gestion durable et équitable des ressources naturelles », par le Centre de Recherche et d’Information pour le Développement, le 6 décembre 2011, disponible en ligne à : http://www.ritimo.org/article963.html

      (2) « La gestion de l’environnement et des ressources naturelles : Une préoccupation croissante du FIDA», FIDA, disponible en ligne à : http://www.ifad.org/pub/enviorn/EnvironFRA.pdf

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  2. Je trouve très pertinent d’aborder la question de l’exploitation des ressources naturelles avec l’aide au développement, car de plus en plus l’aide que nous pourrions penser être en lien avec le monde de la coopération, se retrouve entre les mains d’entreprises privées. Sachant que la motivation première des entreprises est le profit et que leur principale préoccupation est l’intérêt de leurs actionnaires, nous pouvons nous demander de quelle manière celles-ci contribuent-elles réellement au développement de pays nécessitant de l’aide. Tel que l’a mentionné Halilem, la présence d’entreprises minières canadiennes dans certains pays africains, causent plusieurs impacts négatifs autant sur l’environnement que sur la population locale. Nous faisons référence ici à la contamination des cours d’eau, des nappes phréatiques et des sols, de la perte de biodiversité, de la destruction de l’environnement ainsi que des problèmes de santé et des mauvaises conditions de travail de la population locale. Toutefois, le gouvernement canadien semble croire que l’aide au développement nécessite davantage la présence de ces compagnies minières qui accroissent l’économie canadienne ainsi que l’économie locale à la place de concentrer son aide dans l’éducation, la santé et l’éradication de la pauvreté des pays dans le besoin, qui est à la base du développement d’un État.

    Je tiens cependant à rappeler que l’ACDI (Agence canadienne du développement international) avait été créée dans le but de financer l’aide humanitaire ainsi que des projets de développement à long terme visant à réduire la pauvreté . Le ministre canadien des Affaires étrangères a cependant rappelé dernièrement la position du gouvernement actuel qui affirmait plutôt que « l’ACDI était un outil pour aider les entreprises commerciales à l’étranger » et le ministre de la Coopération international que « l’aide canadienne envoyée dans les pays pauvres devrait rapporter des bénéfices sonnants et trébuchants pour les Canadiens ». Pour cela, il est donc nécessaire d’appuyer les compagnies minières afin qu’elles puissent exploiter les ressources naturelles de pays en développement, enrichissant celles-ci au détriment des populations locales, et ce, sous le prétexte de leur apporter une aide. Cela rapporte définitivement plus de bénéfices au Canada, que de subventionner de simples ONG (Organisation non-gouvernementale) qui effectuent des projets de développement en éducation de base, en microfinance, etc.

    Tel que le démontre le document de travail émis par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international lors des Tables rondes sur l’exploitation minière en Afrique, il serait de la responsabilité des « autorités canadiennes de veiller à ce que les entreprises [minières exploitant des ressources à l’extérieur du pays] fassent preuve de responsabilité sociale relativement aux questions politiques, environnementales et économiques ». Toutefois, le gouvernement canadien est le premier à garantir l’impunité sur leurs pratiques douteuses. Donc pour répondre au commentaire de monsieur Harilem sur son questionnement qui portait à savoir à qui incombe la responsabilité de rendre ce développement plus équitable, je crois que la question qui se pose est plutôt qui a le pouvoir de le faire? Je crois personnellement que les instances internationales devraient avoir un rôle à jouer, toutefois si aucune mesure disciplinaire ne peut être appliquée à un acteur qui ne respecte pas les règles érigées, cela n’améliorera pas la situation actuelle. Pour le moment, aucune organisation internationale n’a encore le pouvoir de sanctionner réellement les États. Il en va malheureusement du simple désir politique d’un État de prendre ses responsabilités et d’exiger un développement plus équitable en légiférant sur le sujet et en imposant des sanctions sévères aux contrevenants.

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    1. Merci Chloé pour ton commentaire précis et juste. Je suis du même avis que toi quand tu dis que les instances internationales auraient un rôle important à jouer dans la régulation, mais également dans la vérification et dans la sanction aux pays contrevenants. Effectivement, lorsqu'il n'y a pas de pénalités, les pays peuvent très bien continuer leurs pratiques sans se soucier des dégâts causés dans les pays du Sud. Qui sait, ça sera peut-être la suite des Objectifs du millénaire pour le développement, de créer une instance qui agira à titre de vérificateur?
      Il existe bien une Cour pénale internationale, pour juger les individus accusés de crimes contre l'humanité, alors on peut peut-être espérer à une Cour internationale pour le développement durable et équitable?

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  3. Désolé, j'ai oublié de signer!

    Chloé Lamontagne

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  4. Mélisande Alric13 avril 2013 à 15 h 11

    En effet, la responsabilisation sociale des entreprises (RSE) dans le secteur minier est un sujet qui arrive sur les agendas des Etats. Cependant, il existe encore malheureusement des réticences à intégrer cette notion de RSE.

    Même si l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et le Canada « se portent volontaires et assurent leur présence dans ces pays au nom du développement », ce n’est pas pour autant qu’ils sont prêts à officialiser leur propos et/ou promesse à travers une loi. Il est vrai que les Etats-Unis ont voté une loi pour la responsabilisation des entreprises en juillet 2010, l’Article 1504 de la loi Dodd-Frank [1], cependant le Canada a des difficultés à prendre position et à s’affirmer pour la RSE. Le pays a d’ailleurs rejeté le projet de loi C-300, présenté par le député libéral John McKay [2]. Pourtant, le Canada est l’un des principaux acteurs de l’exploitation minière. Le Canada aurait-il des faits à se reprocher ?

    En Guyane, le Canada profite du manque de gouvernance pour corrompre l’Etat afin d’effectuer en toute liberté ses investissements dans l’exploitation minière tout en bafouant les droits humains et les impacts environnementaux [3].
    Les peuples autochtones aussi bien au Canada que dans les pays en développement sont souvent victimes et impuissantes face aux exploitations minières. Les terres de ces peuples sont utilisées sans leur consultation. « 50% de l’or extrait entre 1995 et 2015 proviendra de territoires traditionnels de populations autochtones »[4].

    Aussi, la RSE est importante mais la responsabilité du consommateur l’est tout autant. Certaines exploitations minières contribuent aux conflits armés existants dans certains pays comme en République du Congo. Les rebelles exploitent les locaux pour financer leurs armes grâce à la vente des minerais et réussissent à passer la frontière ougandaise ou soudanaise [5]. S’il existait une règle de traçabilité des minerais, les entreprises seraient forcées d’indiquer leur provenance et le consommateur serait alors averti.

    La responsabilité sociale des entreprises reste un sujet complexe avec de nombreux enjeux, notamment économique. Les gouvernements peinent à prendre position sur la question. Pourtant, il est nécessaire pour le développement des pays que les gouvernements votent une loi claire pour les entreprises en exploitation minière et également une loi obligeant la traçabilité des minerais et la transparence pour le consommateur. La RSE triomphera t-elle face au capitalisme? Les populations autochtones finiront-elles par être prises en considération dans les débats ?

    [1] Revenue Watch Institute. (2012). Divulgation en vertu de la loi Dodd-Frank: déclarations obligatoires en vertu de l’Article 1504. In Revenue Watch Institute. Tiré de http://www.revenuewatch.org/fr/news/divulgation-en-vertu-de-la-loi-dodd-frank-d%C3%A9clarations-obligatoires-en-vertu-de-l%E2%80%99article-1504
    [2] Radio Canada. (2010). Le projet de loi C-300 défait par six voix. In radio-canada.ca. Tiré de http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2010/10/27/001-miniere_responsabilite.shtml
    [3] Milesi, J. et Bullard, K. (2013). Canadian Exploitation in the Mines of Guyana. In Council on hemispheric affairs. Tiré de http://www.coha.org/21247/
    [4] CDHAL. (Non daté). Exploitation minière et droits humains. In Comité pour les droits humains en Amérique latine. Tiré de http://cdhal.org/mines
    [5] Université Laval. (2012). La République du Congo et l’exploitation minière. Conférence organisée par Développement et paix pour la Semaine de la Coopération internationale.

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    1. Merci Mélisande pour cet apport à la fois tout à fait pertinent et aussi percutant. Effectivement, le Canada a visiblement des choses à "cacher" avant d'intégrer un principe de responsabilité sociale des entreprises. Il est clair que la façon de faire actuelle ne répond pas à ce principe de développement durable et équitable envers la population locale, si on regarde la réalité dans les pays d'exploitation.
      J'ai particulièrement apprécié le fait que tu amènes le débat plus loin en laissant entendre qu'il s'agit également de la responsabilité des individus qui consomment de ces produits. En effet, à l'heure actuelle, il est plutôt difficile de juger si un produit est équitable (sauf s'il est identifié ainsi... mais encore...les résultats finaux du commerce équitable sont souvent mitigés... mais c'est un autre débat!) et s'il provient d'une exploitation visant un développement durable. Ainsi, il est clair que le principe de RSE devra inclure, comme tu le proposes, une clause sur la traçabilité du minerai ou de quelconque ressource naturelle.

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  5. Bonjour!

    J'écris juste un commentaire informel car je pense que c'est vraiment en rapport avec votre sujet mais aussi parce que malheureusement je ne retrouve pas l'article que je vais pourtant citer ...

    J'avais lu à l'Automne 2012 (septembre ou octobre) un article dans Les Affaires qui malgré sa brieveté présentait bien des paradoxes de la relation skyzophrene qu'entretiennent les pays du nord avec les pays du sud qu'ils aident et destituent de leurs ressources en même temps ...

    Il s'agissait d'un pays d'Afrique de l'Ouest (je sais c'est vaste)dont la population souffrait de la faim et qui s'était spécialisé dans la production de cacao afin d'en faire un commerce avec les pays développés. Le problème était multiple, le cacao qui est utilisé dans la fabrication du chocolat ne sert qu'aux pays riches qui peuvent se permettre ce luxe et non aux populations locales puisque le cacao est très peu nourrissant mais aussi parce que le commerce avec les pays riches en a fait flamber les prix, le rendant alors inabordable pour la population locale moyenne. De plus, les agriculteurs de denrées alimentaires faisaient alors face à une difficulté surprenante: alors que la population souffrait de la faim ils n'arrivaient pas à vendre leur production. La raison: l'aide alimentaire des pays riches était gratuite, or ils ne pouvaient pas concurrencer cette gratuité ...

    Vous avez déjèa compris je suppose: malgré le manque de denrées alimentaires pour nourrir la population, les agriculteurs étaient doublement poussés à se tourner vers la production de cacao qui ne profite qu'aux nations les plus riches, entrant ainsi dans un cercle vicieux.

    Dans cet exemple, on voit la complexité des liens qui poussent des pays riches à aider ceux qui en ont besoin d'une main (en leur offrant une aide alimentaire gratuite) et à exploiter leurs richesses de l'autre main (en détournant ceux qui pourraient produire de quoi nourrir un partie de la population afin de servir leurs intérêts.

    Héloise
    (Blog sur les sociétés for profit dans l'aide internationale)

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  6. Merci énormément Héloise d'avoir apporté ce supplément d'informations par le biais de cet exemple concret (même si tu n'as pas la source, tu as très bien su l'expliquer!). Si jamais tu trouves cet article, n'hésite pas à nous en faire part, car il semble tout à fait intéressant et pertinent dans ce débat sur l'exploitation des ressources naturelles.
    Effectivement, les pays pauvres sont constamment pris dans ce cercle vicieux et j'ai malheureusement l'impression que ce n'est que le début de cette relation injuste et complexe.

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